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L'ÉDUCATION DE NÉRON 1
part de compliments qu’il était seul à mériter. S'effa-
cer derrière Néron, lui souffler ainsi son rôle, le faire
applaudir, Le faire aimer, sans quitter soi-même l'ar-
rière-plan, telle sera dorénavant la posture du phi-
losophe. Il pourrait se produire, travailler à s’illus-
trer lui-même ; il n’est et ne veut être que l'institu-
teur du futur chef de l'État et reste exprès dans la
pénombre. [l accepte, comme une conséquence naltu-
relle de ses fonctions, de devenir le pourvoyeur d’i-
dées, le préparateur de belles paroles de son élève.
La même circonspection se retrouve en toute sa
conduite. Au Sénat, il ne se mit jamais en avant. Il
avait dû cependant, depuis sa préture, prendre part
à plusieurs débats importants. Il ne s'était évidem-
ment pas opposé aux faveurs réclamées pour Néron
par ses collègues ; il avait pu s’en tirer, à la manière
de Thrasea', par une brève adhésion. On peut pré-
sumer qu'il vota le sénatus-consulte de 52 contre les
astrologues ? : s’il croyait, comme Sloïcien, à la divi-
nation, il n’aimait pas les charlatans”*. La répugnance
qu'il exprime dans tous ses écrits pour l'impudicité
des femmes de son temps trouva, cette mème année
32, l'occasion de se manifester efficacement : il ap-
prouva sans doute la loi relative aux femmes qui
avaient commerce avec des esclaves. On sait que
cette loi, qui instituait une pénalité très sévère, fut
proposée par Claude lui-même, qui en reporta tout
1 Cf. Tacite, Ann. XIV, 12 : silentio vel brevi adsensu.. adula-
tiones transmittere solitus. f
? Tacite, Ann., XII, 52; Zonaras, XI, 10.
® Cf. Ludus de morte Claudii, HI.
4 lacite, Ann., XII, 53. — Cf. Suétone, Vespas., 11; Gaius, Com-
ment., I, 84, 91; Ulpien, XI, 11; Paul, Sent., Il, xxrt; Justinien,
Instit., VX, xxx, 4 ; Cod., VIT, xXXIv.