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PRINCIPES ET PROGRAMME 253
Ce que Caïus avait fait par lubie, Sénèque se pro-
posait de le faire par raison.
Il avait annoncé que le gouvernement de Néron
respecterait les droits traditionnels du Sénat’. Cette
déclaration impliquait, semble-t-il, la reconnaissance
d’une répartition précise des pouvoirs entre le
prince et l'assemblée. Elle signifiait que l’on obser-
verait loyalement les clauses de cette espèce de
convention latente qui seule établissait les limites
de leurs attributions respectives. Voici quelles en
étaient les bases, autant que la critique moderne à
su les discerner”. Communs dépositaires de la sou-
veraineté, l’empereur et le Sénat ont cependant
chacun son rôle distinct dans la gestion des affaires
publiques. Les affaires militaires et les relations
‘avec les puissances étrangères sont du ressort exclu-
sif du prince : il y jouit d'une suprémalie sans
réserve. La faculté de légiférer n'appartient en
revanche qu’au Sénat, les lois devant être promul-
guées sous la forme de sénatus-consultes. Toutefois
les décisions du prince, publiées sous forme d’édits,
de décrets ou de constitutions, ont force de loi durant
son règne, et il est libre, d'autre part, d'interpréter
la loi selon ses vues particulières. Sur certains points,
il y a identité de compélence entre le prince et le
Sénat : en matière de justice criminelle, tout procès
peut être indifféremment soumis soit à l’une, soit à
l’autre des deux juridictions suprèmes. Sur d’autres,
il y a seulement équivalence : en matière d'adminis-
tration et de justice civile, le Sénat présidé par les
1 Teneret antiqua munia senatus. Tacile, Ann, XI, 4.
2 Voir surtout Mommsen et Marquardt, Manuel des Anliquilés
romaines, passim.