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DISGRACE DE SÉNÈQUE 403
factieux, était mise à sac et à sang : « Que fit Caton
que de pousser des cris, que de s’égosiller en vain ?
Un jour, empoigné par le peuple et couvert de cra-
chats, il élait jeté hors du Forum ; le lendemain, on
le menait du Sénat en prison. » À la conduite de
Caton, si cruellement payé de son aveugle dévoue-
ment au bien, Sénèque oppose la sagesse mieux
réglée de ces véritables philosophes qui, se voyant
exclus de la vie publique, se sont retirés de bonne
grâce, afin de se culliver eux-mêmes et de travailler
pour le genre humain sans heurter les puissances
établies‘.
Cest cet exemple qu'il voulut suivre. Comme
tous les grands esprits que la politique à déçus,
il se rejeta ‘dans l'étude, lui demanda conso-
lation et compensation. Il lut assidûment, cherchant
Partout des leçons de fermeté, méditant avec le
même zèle les maximes d'Épicure et celles de Zénon.
l commença la rédaction d’un vaste ouvrage ‘de
Morale, où devaient être consignés, à l'intention
des générations futures, les résultats de ‘sa tardive
expérience *. [I publia les sept livres de ses Questions
naturelles. 11 dut à ses travaux, au milieu de craintes
incessantes, des moments de recueillement sévère et
d'amère sérénité ; sa pensée se maintint à des hau-
leurs où elle n’avait encore atteint que par inter-
Valles ; son cœur vieilli s’illumina :$i bien que cette
dernière période de:sa vie est une de-celles qui font
le ‘plus d'honneur à la fois à son talent-et à ‘son
Caractère.
‘Epist., XIV, 13-44.
* Epist., VU, 2-6; GVI, 12; CII, 4; CIX, 47. I ne le termina
Probablement pas.