LA TYRANNIE SOUS TIBÈRE ET SOUS CAIUS 67
lui, alterner; chacune sert de remède à l'autre’. Le
goût de la société lui était d’ailleurs naturel. Il
recherchait d’abord les personnes instruiles et ver-
lueuses, dans le commerce desquelles on poursuit,
Sans l’achever jamais, son apprentissage d'homme
el de philosophe. Aussi s’attacha-t-il passionnément
à Demetrius le Cynique, qui avait à peu près son âge,
Mais près de qui il se sentait toujours un écolier.
Comme au temps de son adolescence, il ne jurait que
par Sotion et Fabianus, il ne jure maintenant que
par Demetrius. C’est à la fois le modèle des plus
pures vertus et le plus éloquent moraliste ; c’est un
Srand homme entre les plus grands, un être provi-
dentiel envoyé sur terre pour l'édification du vulgaire,
sublime de courage, de sérénité, de fierté dans l’in-
digence qu'il s'impose, et qui, comme Caius lui
Offrait deux cents sesterces, les refusa avec un sou-
rire : « S'il avait résolu de m’éprouver, dit-il ensuite,
que ne m'offrait-il lout l'empire! » Sénèque, qui
retient ses moindres paroles, ne se lasse pas de les
rapporter. Cet enthousiasme, qui ne cessa jamais, ne
fit, loin de s’affaiblir, que grandir avec les années ?.
Il semble avoir cherché, d'autre part, à grouper autour
de lui, comme autour d’un aîné et d’un maitre, une
petile troupe de jeunes gens bien doués, qu'il con-
Seillait et dirigeait : tels Serenus et Lucilius. Né pour
la direction des âmes, il était fort impatient de répan-
dre la bonne doctrine et de faire profiter les autres
de ses progrès : toute sa vie il en fut occupé. Pas de
! De Trang. an., XNIL. 3.
® De Provid., I, 3; V, 5-6; De Vila beata, XVII, 3 ; De Beñef., VII,
1 4; viri-xt ; Nat. Qu... IV, prf., 7-43 ; Epist., XX, 9; LXIF, 3 :
LXVII, 44; XCI, 19. — Cf. Tacite, Ann., XNE, 34.